La SNCB n’investira plus en Wallonie !

A l’heure où les réalités écologiques, économiques et sociales poussent en avant l’utilisation de transports moins gourmands en énergie, dont le train, la SNCB, toute acquise à la cause flamande, pénalise la Wallonie et ses citoyens Wallons en leur imposant, de son propre chef, des réductions drastiques de son offre ferroviaire en Wallonie.

Pour mieux comprendre les impacts et les enjeux, voici l’état des lieux de l’offre SNCB en Wallonie.

 
Le réseau ferré en Wallonie est insuffisant et incomplet :

Trop de villes et communes wallonnes ne sont pas desservies par le rail. Résultats : ce sont des régions complètes qui sont volontairement désertées par la SNCB.
Comparé au réseau qui existait dans les années 50, le réseau actuel n’est plus que l’ombre de lui-même. Plus de 40 % des lignes ferroviaires sont passées à la trappe.

Le rail wallon est obsolète :

Victimes d’un sous-investissement chronique, les lignes wallonnes vieillissent mal et se dégradent.
Les vitesses commerciales des trains qui y circulent sont inférieures à celles qu’on réalisait il y a 40 à 50 ans. La ponctualité y est en baisse et les pannes fréquentes.
Les principales lignes wallonnes dont la vieillissante dorsale wallonne ont seulement 2 voies.
En fait le rail wallon a connu peu de renouvellement. Il est dépassé et ne répond plus à la demande.
Il y a peu de temps, le gouvernement wallon a demandé à la SNCB d’étudier la possibilité du train pendulaire, plus adapté aux lignes sinueuses wallonnes, et moins cher que le TGV.
Las ! La Flandre dont les lignes sont peu sinueuses n’y voit aucun intérêt. Le pendulaire wallon a donc été rejeté d’office.

Par contre, dans son projet Spartacus, la Flandre avance vers un partenariat De Lijn-SNCB afin de relier la Flandre à Bruxelles avec des trains-trams ou trains légers. On évoque même une collaboration de la SNCB pour mettre en place un réseau de trains De Lijn sur les lignes locales de Flandre. Une telle collaboration avec la SNCB est inconnue du coté des TEC.

Quant au RER wallon, il a déjà 20 ans de retard et est, chaque année, reporté d’un an.

L’offre
ferroviaire wallonne s’amenuise sans cesse :

La SNCB réduit ses services en Wallonie : fermetures de gares, liquidations d’arrêts, suppressions de trains et réduction des dessertes, voire suppression de lignes.
Comparée à la Flandre, la Wallonie a moins de lignes, moins de gares, moins d’arrêts et moins de trains. Bref une offre ferroviaire nettement moindre.
Plus encore, beaucoup d’arrêts wallons sont en sursis, victimes de la politique de mort lente pratiquée par la SNCB. Avec des dessertes bien en-dessous de la norme minimal d’un train par heure en heure creuse et de deux trains par heure en heure de pointe, la SNCB rend ces arrêts peu attractifs.

Conséquence, leurs fréquentations diminuent, donnant ainsi à la SNCB les arguments pour justifier leurs suppressions définitive.

La SNCB isole la Wallonie :

La SNCB supprime les liaisons transfrontalières wallonnes les unes après les autres et atrophie le réseau wallon. La Wallonie ferrée est de plus en plus isolée de ses pays voisins dont en particulier la France. En fait, le réseau wallon est tourné quasis exclusivement dans une seule direction : la Flandre.
Ceci dégrade l’attractivité économique de notre région. Et nous rend toujours plus dépendant de la Flandre.

Le réseau marchandises wallon est au plus mal :

Les derniers gigantesques travaux réalisés en Flandre permettent son contournement via les Pays-Bas, signant ainsi son extinction.
– Le tunnel de Liefkenshoek à Anvers, un projet d’environ 10 milliards, relie la Flandre marchande directement aux Pays-Bas. Depuis, le trafic marchandises qui transite par la Wallonie est en régression. La ligne Athus-Meuse réalisée à la demande du port d’Anvers, mais sur le quota wallon n’est quasi plus utilisée. Et les gares de tri wallonnes dont l’utilité est remise en cause se savent condamnées.
– Le DIABOLO, environs 10 milliards, à Zaventem, permet aux villes flamandes d’être reliée entre elles via Zaventem, en évitant Bruxelles et la Wallonie.
Ainsi, le réseau flamand, voyageur et marchandises, est bouclé. Un atout appréciable en cas de séparation de la Flandre avec Bruxelles et la Wallonie.
Le Diabolo ouvre aussi la voie au marchandise grande vitesse au profit de Zaventem et de la Flandre. Un plus dont la Wallonie et ses aéroports régionaux ne profiteront pas.
A ce sujet, la Flandre qui ne digère pas la réussite de l’aéroport de Charleroi, a pris les dispositions pour supprimer les budgets pour le projet de gare à Gosselies.

La répartition des budgets dans et hors de la clé 60/40 est discriminant envers la Wallonie :

La clé de répartition 60/40 (60 % pour la Flandre et 40 % pour la Wallonie) est très défavorable à la Wallonie, qui, avec un territoire plus grand que celui de la Flandre, a les distances entre villes les plus longues.
On le sait moins, mais tous les budgets ne sont pas soumis à la clé 60/40. Les budgets des principaux projets flamands, échappent, via des manipulations financières, à cette clé.
Ainsi la Flandre, au détriment de la Wallonie, obtient plus que les 60 % auxquels elle a droit. Exemple : Le tunnel de Liefkenshoek a été considéré comme projet national et est donc financé par les crédits nationaux de la SNCB (50/50 Flandre et Wallonie). A l’inverse, le tunnel de Soumagne à Liège est considéré comme projet régional. Il est donc financé exclusivement sur les 40 % de la Wallonie.

 Cette politique présente deux effets pervers :

1) Plus les budgets pris hors de la clé 60/40 sont grands, moindres sont les montants alloués par la clé 60/40.
2) A force d’abuser de cette pratique, la Flandre n’utilise pas toujours l’entièreté de ses 60 %. Ce qui impacte directement les dépenses wallonnes qui sont liées dans le rapport 60/40 à leurs correspondantes flamandes. Du coup, la Wallonie est contrainte d’utiliser qu’une partie (équivalente à celle flamande) de ses 40 %.

Une autre pratique consiste à forcer la Wallonie à financer des projets flamands. Exemple : Le projet du RER Wallon n’a été obtenu qu’aux conditions que le RER wallon desserve les communes flamandes qu’il traverse et ce financé exclusivement par le budget wallon.
Autre cas : La modernisation de la ligne Athus–Meuse a été réclamée par le port d’Anvers, mais financé uniquement par les 40 % wallons.

On pourrait croire qu’après avoir touché le fond, on ne tombera pas plus bas.
Pourtant le pire est à venir.
La SNCB a prévenu qu’elle n’investira plus en Wallonie.
Le Thalys wallon est suspendu pour 6 mois minimum.
La gare de Gosselies (aéroport de Charleroi) est compromise.
Et la dernière, la SNCB annonce la suppression de 198 trains au niveau national. Une suppression qui touchera durement la Wallonie qui souffre déjà d’une offre ferroviaire trop pauvre.
Visiblement, la SNCB et ses administrateurs représentant l’ensemble des partis politiques, y compris wallons, oublient qu’en tant que entreprise publique financée par l’état fédéral, la SNCB a autant d’obligations envers la Wallonie qu’envers la Flandre.

D’autre part, vu que son financement provient des impôts payés par les citoyens au nom des usagers du train, la SNCB est redevable envers ses usagers bien plus qu’envers les marchandises.
Car, l’usager est non seulement un client mais plus encore, un actionnaire de la SNCB.
Des clients, actionnaires mécontents, car négligés par une SNCB qui préfère investir massivement, à perte, dans le marchandise en Flandre.

Pourtant, conscient des enjeux, le gouvernement wallon a commandé une étude à TRITEL pour déterminer les objectifs ferroviaires essentiels pour la Wallonie.
Ce projet de développement ferroviaire wallon sur 12 ans (plan TRITEL) auquel l’ACTP (Association des Clients des Transports Publics) a largement contribué, est évalué à 2,2 milliards.
2,2 milliards en 12 ans. Trop cher dit la SNCB, il faut faire des économies !
Des économies ! En Wallonie certainement, mais visiblement pas en Flandre !

La SNCB saigne le rail wallon au profit de la Flandre qui ne se prive de rien :

  • environ 10 milliards investis dans le projet DIABOLO à Zaventem. Le DIABOLO dont l’objectif principal est de boucler le réseau flamand en reliant les villes flamandes via Zaventem, sans passer par Bxl et la Wallonie.

  • Environ 10 milliards investis dans le tunnel de Liefkenshoek à Anvers.

  • Électrification de la ligne Mol–Hamont.

  • Mise à 4 voies de la ligne Gand–Bruges.

La dette de la SNCB s’élève à 3,1 milliards (4 milliards en 2013). Elle provient surtout du marchandise dont les investissements sont essentiellement localisés en Flandre.
Entre 96 et 2012, B-Cargo a généré une dette de 2,4 milliards. Pour rappel le plan wallon n’est que de 2,2 milliards sur 12 ans.
Mais voilà, le centre de décision SNCB est flamand.
Le QG informatique de la SNCB-Holding est installé à Malines.
La Flandre a donc la main sur les horaires, la gestion du réseau, la gestion du personnel, etc.
Les directions opérationnelles, chargées des choix stratégiques de développement, sont occupées par les néerlandophones, les francophones héritant des directions logistiques.
La SNCB et ses dirigeants flamands ne respectent pas la Wallonie.

Dans ces conditions, si la Wallonie veut s’en sortir, elle doit sérieusement négocier avec la SNCF des synergies pour enfin se doter d’un réseau ferroviaire conforme à ses besoins.
Il en va de notre avenir ! Car demain, seules les régions ayant un réseau ferroviaire performant pourront rester économiquement attractives.
La Flandre qui, sur le dos de la Wallonie, se dote d’une infrastructure performante l’a bien compris.

Quand pourrons-nous espérer que les décideurs wallons osent en faire autant ?

 

Claude Roland