Un Zemmour lucide, un Roegiers dans le brouillard - 17 avril 2010

L’édition belge de Paris-Match du 15 avril consacre un dossier spécial à « la fin de la Belgique vue de France ».

Extrait de l’interview d’Eric Zemmour dont un chapitre de son livre Mélancolie française (Fayard, 2010) évoque l’avenir de nos contrées.

Associé à La Libre, Paris-Match accorde également un article à Christian Laporte, le cireur de pompes royales le plus zélé.

Plus intéressant pour nous, un autre hagiographe de la monarchie, l’écrivain Patrick Roegiers, ne semble plus croire en l’immortalité de la Belgique puisqu’il confesse : « La confédéralisme mène à la scission. Pour l’avenir, je vois une Flandre indépendante. Bruxelles comme un district européen. Une ville-Région, capitale d’un Etat qui n’existe plus. Quelques cantons rédimés proches de l’Allemagne. Liège comme une pièce rapportée de la France (sic). Et la Wallonie nulle part (resic). »

A noter que la comparaison d'Eric Zemmour de la Belgique avec la RDA est à placer dans un cadre d'analyse historique : la Belgique évoque pour la France la défaite de Waterloo comme la RDA représentait la capitulation de 1945 pour la République fédérale allemande.

Jacques Attali, dans son livre Une brève histoire de l'avenir, entrevoit la disparition de la Belgique à l'horizon de 2050, en raison, pense-t-il, de l'emprise croissante du marché mondialisé et des logiques marchandes qui vont pousser les régions riches à ne plus partager leurs richesses avec celles moins favorisées. Etes­-vous d'accord avec cette analyse?

Sur ce point, je suis complètement d'accord. J'intègre d'ailleurs ce volet économique dans mon raisonnement historique. J'ajoute que la mondialisation rendant les Etats centraux inutiles, les régions les plus riches sont de plus en plus enclines à vouloir s'autonomiser, conscientes du fait qu'elles se débrouillent très bien toutes seules.
A ce sujet, je ne vous apprends rien en vous disant que la Flandre tire ses revendications autonomistes de l'argument selon lequel elle s'appauvrit en contribuant au maintien à flot de la Wallonie.
Les querelles linguistiques et l'humiliation historique ressentie par la Flandre passent au second plan, d'après moi. D'ailleurs, je le mentionne dans le livre parmi d'autres exemples : l'histoire des soldats flamands de la guerre de 1914, mourant parce qu'ils ne comprenaient pas les ordres donnés en français par les officiers wallons, c'est un mythe littéraire absolu, inventé par Raymond Sanders dans son roman de 1927 intitulé Aan den Vlaamschen Ijzer.
Le cœur du problème, c'est que la Flandre souhaite conserver sa richesse pour elle seule. On retrouve là le raisonnement tenu par le nord de l'Italie vis-à-vis du sud. Mais si la Flandre est riche, elle le doit en partie à la manne de l'Etat belge, payée par les Wallons.

La Flandre a vécu aux crochets de la Wallonie

[...]

Vous écrivez que la Belgique est la « réunification » française, Bruxelles comprise.
Voyez-vous le rattachement de l'ensemble Wal­Ionie-Bruxelles à la France comme une évolution inéluctable?

Je pense que c'est inexorable, en effet. Mais ça passera par un bras de fer. De façon moins intense sans doute, l'enjeu est pour la France ce qu'était celui d'Anvers au temps de Napoléon. Au-delà, je n'en sais pas plus pour l'instant que ce que j'ai écrit dans le livre. On verra. Le problème du devenir de Bruxelles ne sera pas simple à régler. Ensuite, l'Allemagne, l'Angleterre et les Etats-Unis auront beaucoup de mal à accepter que la France engrange, si j'ose dire, Bruxelles, qui est quand même d'une richesse exceptionnelle, même si elle conserve de très importantes poches de pauvreté.


© R.W.F. Dernière mise à jour le samedi 17 avril 2010 - Ce site est le seul officiel du R.W.F.