Histoire belge - 22 mai 2009

Article de Marion Van Renterghem

Qui a dit que la capitale de l'Union européenne se trouvait en Belgique ? A Bruxelles, il semble douloureux d'appliquer l'harmonie communautaire pourtant si scrupuleusement régulée ici même. Nos amis les Belges s'emploient à y semer un joli bazar, et, tant qu'à faire, en pleine campagne pour les élections européennes du 7 juin.

Onze bourgmestres (maires), dans les communes flamandes qui ceinturent la capitale, ont décidé de boycotter les élections. Les néerlandophones boudent et bouderont tant que ne sera pas résolu ce fameux "problème BHV", où il est autrement plus complexe de se repérer que dans les allées de la quincaillerie du même nom, en sous-sol du grand magasin parisien. Le BHV belge, alias Bruxelles-Hal-Vilvorde, est cet arrondissement électoral et judiciaire qui englobe les dix-neuf communes de Bruxelles et une partie de sa périphérie où certaines municipalités, officiellement bilingues, sont situées en territoire flamand. D'où le hic.

Les Flamands ne supportent pas que les francophones qui vivent ainsi sur leur territoire aient le droit de voter pour des partis francophones de la circonscription. Faute d'obtenir la scission électorale de BHV, ils se livrent à toutes sortes de facéties : à Affligem, ils ont recouvert de blanc les affiches électorales francophones. A Hal, ils n'ont autorisé que les Flamands à coller les leurs sur les panneaux communaux. Ailleurs, ils ont carrément interdit toutes les affiches, pour ne pas en voir en français. Et pour couronner le tout, certaines communes ont décidé de ne pas organiser le scrutin.

Jacques Barrot, vice-président de la Commission européenne, a écrit aux autorités fédérales belges, inquiet que ne soit pas assuré le principe d'universalité du suffrage. Rien de grave, lui a-t-on répondu : les maires desdites communes refusent certes de se charger des listes électorales et des convocations, mais le gouverneur de la province (Brabant flamand) le fera à leur place. Donc au bout du compte, tout le monde pourra voter. Où est le problème ? La Commission s'estime satisfaite. "Sur le plan symbolique et politique, ce n'est tout de même pas très heureux", convient Jacques Barrot.

Le ministre de l'intérieur du gouvernement régional flamand, Marino Keulen, ne veut pas prendre de sanctions contre les bourgmestres boycotteurs. De leur côté, les bourgmestres francophones des communes de BHV continuent à faire de la provocation en envoyant des convocations électorales en français, alors qu'ils sont censés les envoyer d'abord en néerlandais. Depuis les élections municipales de 2006, M. Keulen les a punis en ne validant pas leur nomination. Le Conseil de l'Europe a désapprouvé.

Résumé : en Belgique, les maires non validés organisent les élections européennes, les maires validés les boycottent, francophones et néerlandophones se tirent dessus au pistolet à plomb, l'Europe botte en touche. Ainsi va le cœur symbolique de l'Europe qui est aussi, il est vrai, la patrie du surréalisme.

Sujet transmis par Etienne Thienpont, notre correspondant en France


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