Belgium, the E.N.D. : Espace de Non Droit - 2 avril 2009

Un article de Jean-Claude Matgen a jeté un pavé dans la mare de la Justice belge.

Sous le titre évocateur « Moins de trois ans de prison ? Cool… », le journaliste et un juge évoquent largement les lacunes de la Justice belge en matière d’application des peines prononcées. Mais s’ils enfreignent un tabou, ils le font avec des précautions oratoires du genre : la Justice belge n’est pas « laxiste » (Mariusz, l’un des assassins de Jo Van Holsbeeck, relâché après un an d’IPPJ, doit penser le contraire…) ou encore « La situation actuelle fait le lit des idées d’extrême droite », etc.

Non, la magistrature belge n’est pas laxiste, mais ceux qui sont chargés de faire appliquer les peines de prison, oui !, le projet de Tribunal d'Application des peines étant toujours en rade, faute de volonté politique.

Voici l’affaire. En raison de la surpopulation carcérale, la plupart des personnes condamnées à des peines égales ou inférieures à trois ans de prison, s’ils n'étaient pas en détention au moment du prononcé de la peine, sont presque systématiquement placées sous surveillance électronique mais compte tenu du manque de bracelets - l'Etat belge est ici pris en flagrant délit d'incompétence ! -, certains condamnés attendent parfois un an chez eux avant d’être surveillés électroniquement.

Rappelons qu’un bracelet électronique n’a jamais empêché personne de poursuivre un trafic illégal. Tandis qu’en prison, c’est nettement plus ardu.
Mardi soir, des membres du parquet général et du siège de la cour d'appel de Bruxelles ont rencontré deux représentants du SPF Justice pour leur dresser un état des lieux accablant pour une démocratie moderne.

Parallèlement, on peut ne pas aimer la politique, jugée « sécuritaire » par d’aucuns, du Président Sarkozy, mais il faut au moins lui reconnaître le mérite des mesures combattant le sentiment d’impunité pour les délinquants qu'éprouve une bonne partie de la population.

La comparution immédiate, l’instauration de la peine minimale en cas de récidive (qui a soulevé une partie de la magistrature contre le pouvoir politique), la responsabilisation pénale de catégories de mineurs, etc.

Mais son gouvernement a également développé une politique de soutien aux victimes qui font trop souvent l’objet d’une attention distraite de la part des autorités.

Sans prendre position dans ce débat polémique, pour un parti pluraliste comme le nôtre qui rassembe des personnes de tous horizons politiques, on peut tout de même se demander s’il ne vaut pas mieux entreprendre des réformes en profondeur, avec certains aléas, plutôt que de se condamner à l’inertie, comme le fait la Belgique. Une inertie qui constitue la forme d'injustice la plus sournoise...

Songeons à l’arriéré judiciaire des tribunaux de Bruxelles provoqué par des exigences d’ordre linguistique.

Arriéré judiciaire : la Belgique condamnée

« Si les Français perdent confiance en la justice, c’est un pan entier de notre démocratie qui est fragilisé. Ce sont tous nos idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité qui sont décrédibilisés. Le Gouvernement se devait de tout mettre en œuvre pour que la justice serve mieux les Français. »
Rachida Dati, Ministre de la Justice.

C’est encore plus vrai pour les Belges !

A Lille : un Bureau d'aide aux victimes

La Justice française : en chantier

La situation actuelle porte atteinte à l’Etat de droit

Le juge Patrick Mandoux parle d’un mauvais signal donné à la société et évoque divers risques de dérives.

Patrick Mandoux, professeur de procédure pénale à l’ULB, est conseiller à la cour d’appel de Bruxelles et porte-parole de l’Union professionnelle des magistrats.

- Que pensez-vous de la non-exécution quasi systématique des peines inférieures ou égales à trois ans ?

Que le système actuellement en vigueur est contraire à la loi. En adoptant une circulaire ministérielle qui ne répond à aucun critère humanitaire ou idéologique mais vise uniquement un objectif pragmatique, celui de combattre la surpopulation carcérale, l’exécutif n’exécute pas la loi.

La surveillance électronique n’est pas une peine prévue par la loi, elle n’est qu’une modalité de l’exécution de la sanction. L’instaurer en tant que mesure générale est une erreur.

En vérité, l’exécutif donne un très mauvais signal aux policiers, qui se demandent pour quelles raisons ils continuent à traquer les délinquants, aux magistrats, du parquet comme du siège, aux victimes et à la société tout entière.

Je n’hésite pas à dire, et je ne suis pas le seul, qu’on porte ici atteinte à l’Etat de droit.

Note : Jean Wauters, coupable de la vaste escroquerie du Village n°1 Reine Fabiola a, écopé de trois ans de prison de ferme.
C’est dire que cette peine de trois ans de prison n’est pas infligée à de simples voleurs d’œufs, à du menu fretin… mais parfois à quelques requins voraces.


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