Demelenne : « Mieux vaut se séparer avant de se détester » - 24 février 2009

En attendant les élections régionales de juin, « la Belgique survit », dit Claude Demelenne, rédacteur en chef d'un magazine politique, « Le Journal du mardi », et auteur de « Pour ou contre la Belgique française ». Ou comment l'idée folle fait son chemin.

Comment en vient-on à se demander si la Belgique ferait mieux de se scinder ?

« La Belgique, j'y ai cru. C'est un pays attachant, un des derniers États multiculturels. Je n'aurais dit ça il y a trois ans mais ma réflexion a évolué de manière pragmatique. Depuis les élections de 2007, ce pays n'est plus capable de mener des réformes d'envergure. La Belgique survit, plutôt qu'elle ne vit, dans la médiocrité. La politique belge a disparu. »

La radicalisation de la Flandre est-elle irréversible ?

« Un Flamand sur deux vote pour un parti autonomiste, voire séparatiste, sans oublier le parti d'extrême droite le plus fort d'Europe (Vlaams Belang). »

Pourquoi les différences entre Wallons et Flamands se cristallisent-elles aujourd'hui ?

« J'ai des copains flamands. On s'entend encore mais dès qu'on parle de politique, la conversation s'arrête. On ne sera jamais les Balkans. On ne va pas se taper dessus mais ça ne suffit pas pour faire un pays. Mieux vaut se séparer avant de se détester. »

Les francophones sont-ils résignés sur l'avenir du pays ?

« Je juge l'attitude wallonne pleine d'hypocrisie. Ils veulent gagner du temps, les dix, quinze ans qui permettront à la Wallonie de se redresser.
Ce n'est pas responsable. Les francophones doivent plutôt préparer l'avenir, ne pas exclure une paralysie qui forcera à passer à autre chose. »

Un ultime compromis à la belge ne vous paraît plus réaliste ?

« À court terme, l'enjeu sera le paysage politique flamand en juin à l'issue des élections régionales. Si la Flandre ne peut plus se passer d'un parti autonomiste, le ver est dans le fruit et on le mange. Ce serait gravissime. Une révolution de velours pourrait se produire. On peut dans ce cadre imaginer un rapprochement de la Wallonie avec la France. Une forme d'association comme avec la Polynésie. Autre solution, un État Wallonie-Bruxelles mais les francophones ne sont pas prêts économiquement et dans leur tête. Il n'y a pas de sentiment national wallon. »

Un rapprochement avec la France est-il crédible ?

« Il y a plus de points communs entre un Français du Nord et un Wallon qu'avec un Flamand. Imaginons que nous soyons lors du deuxième quinquennat de Nicolas Sarkozy, la France apparaîtrait en sauveur. Nicolas Sarkozy serait le premier président français à agrandir le territoire. Dans sa logique napoléonienne, il sauterait sur l'occasion. Plus sérieusement, l'Europe gronderait les Belges. Ce serait très mauvais pour son image. Mais la politique-fiction n'est plus exclue. »

Reste la question centrale de Bruxelles...

« Chez les Flamands, il y a une volonté de garder une vitrine belge avec rien derrière. Sauf Bruxelles, carte de visite mondiale. Or la capitale est à 85-90 % francophone.
Dans les futures négociations, il y aura moyen d'en tirer des contreparties. »

A lire : Pour ou contre la Belgique française, de Claude Demelenne (Le Cherche-Midi éd.)

L'interview sur le site de La Voix du Nord

Claude Demelenne dans le Métro français


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