Quelques réflexions sur la sécession du Kosovo -19 février 2008

de Paul-Henry Gendebien, Président du R.W.F.

Parmi ceux qui combattent le R.W.F., nous en connaissons qui doivent être à quia devant le comportement de l’Europe au Kosovo. Ils nous rebattaient les oreilles avec leurs certitudes : jamais, au grand jamais, l’Europe ne reconnaîtra l’indépendance de la Flandre, car elle tient par-dessus tout à la stabilité étatique et à l’intangibilité des frontières.

Aujourd’hui, une vingtaine d’Etats membres (sur 27), encouragés par la Commission qui s’en mordra les doigts peut-être plus vite qu’on ne le pense, s’apprêtent à reconnaître le nouvel Etat du Kosovo. Un Etat, contrairement  à la Flandre, peu viable, aux structures économiques et politiques très faibles. Un Etat dont la vraie nature est tout simplement albanaise, et qui pourrait bien, un jour, se rattacher à l’Albanie proprement dite.

Bien entendu, dans cette douloureuse affaire, personne ne songe à exonérer la Serbie elle-même d’une lourde responsabilité dans l’aboutissement actuel d’une longue histoire. Cela dit, est-on sûr de rendre service à la cause de la stabilité balkanique en affaiblissant davantage encore la nation serbe qui en est le pivot central, et en suscitant par ailleurs de nouvelles occasions de crise en Macédoine et peut-être en Bosnie, dont la partie serbe pourrait à nouveau être revendiquée par la mère-patrie au nom des mêmes constats que ceux qui ont présidé à la sécession kosovare ?

Dimanche dernier, jour de la proclamation de l’indépendance du Kosovo, nous avons perçu de la part des médias officiels belges un enthousiasme fébrile et naïf, reflet de l’européisme pavlovien qui est de mise en Belgique, « ce petit laboratoire de l’Europe » comme se complaisent à le proclamer les derniers belgicistes, toujours prompts à remonter en sens inverse le cours et le sens de l’Histoire.

Quant à l’Europe, n’a-t-elle pas fait la preuve, dans ce dossier, d’une certaine incohérence ? En effet, c’est au nom de l’identité ethnique et culturelle (albanaise) du Kosovo que l’Europe (on parle ici de la Commission et d’une partie de ses Etats car en tant qu’Union elle n’a pas vraiment de position commune claire) a contribué à la poursuite du démantèlement de la Serbie.

En agissant ainsi, elle condamnait implicitement l’idée d’un Etat serbe pluri-ethnique, ou ce qui en subsistait encore. Mais aujourd’hui cette même Europe s’inquiète, mais trop tard peut-être, du sort de la minorité serbe du Kosovo, et recommande en conséquence aux autorités de Pristina le respect de cette minorité en invoquant le pluri-ethnicisme…

Emberlificotée dans ces contradictions, l’Europe semble singulièrement dépourvue de philosophie politique cohérente. Faut-il ou non accepter les conséquences du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ? L’autodétermination est-elle un droit universel et permanent ? Faut-il ou non construire l’Union sur l’abaissement des Etats nations et donc sur l’abaissement des identités populaires ?

L’Union doit-elle intervenir, au nom de quels principes et de quels pouvoirs, dans les affaires intérieures des Etats en crise ?

Manifestement, elle ne répond pas à ces questions de manière satisfaisante. Ou plutôt elle donne des indications contradictoires.

Tout aussi manifestement, les comportements erratiques de l’Europe dans les Balkans ne la prédisposent pas clairement à émettre des avis autorisés sur la question belge. Mais ceci, on s’en doute n’est qu’une conclusion provisoire.


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