Gendebien, Furlan, Ducarme : un débat éclairant - 3 février 2008
Compte rendu de Jean-Paul Roos

Les temps forts du débat

Le lundi 30 janvier 2008, l'arrondissement de Thuin du RWF a organisé, à Ham-sur-Heure, un débat entre le bourgmestre de Thuin, Paul Furlan, le député MR Denis Ducarme et le président du R.W.F., Paul-Henry Gendebien, sur le thème « Quel avenir pour la Wallonie ? ».
142 personnes y assistaient. Jean-Paul Roos nous en fait le compte rendu.

Pour Paul Furlan, il y a trois réponses possibles à la crise que traverse le pays : rester dans une Belgique unie (c'est la solution qu'il privilégie), créer un Etat régional wallon ou envisager un rattachement à la France. Il n'est toutefois prêt à poursuivre l'expérience belge qu'à deux conditions : la solidarité entre les personnes doit être préservée et l'impôt des sociétés doit rester une compétence fédérale.
Il faut, selon lui, chercher ce qui rassemble, pas ce qui divise.

Denis Ducarme constate que la situation est extrêmement dégradée, à telle enseigne que, dans le courant du mois de septembre, le président du MR, lors d'une réunion du Bureau du parti, a posé ouvertement la question : « Va-t-on voir la fin de la Belgique ? »

Dans les contacts qu'il a avec les ministres et députés flamands, il ne peut que constater le schisme qui existe entre le nord et le sud du pays. La question se pose dès lors de savoir s'il faut tout mettre en œuvre pour sauver le pays, alors que la majorité des élus flamands, et de la population, a de toute évidence la volonté d'en finir.

On se trouve donc à la croisée des chemins. Il est très important, dans ces conditions, de préserver le lien de solidarité avec Bruxelles (« Je suis francophone avant d'être Wallon », déclare-t-il).

Il dénonce le comportement fascisant de nombre d'élus flamands.

Paul-Henry Gendebien fait observer qu'il y a trente ans les régionalistes et les fédéralistes étaient traités d'inciviques. Il rappelle la citation d'Edgar Faure : « C'est un grand tort d'avoir raison trop tôt. »

On a perdu une génération à se battre pour que la Wallonie obtienne des pouvoirs. « Où en est aujourd'hui l'idée wallonne ? Où est la réussite wallonne ? » demande-t-il avec une pointe d'amertume.

Devant l'agressivité flamande, il faut préparer l'étape suivante. La Flandre est une nation, elle n'aime plus la Belgique. Il faut en tirer les conclusions. Cette situation inquiète les Wallons, qui n'obtiennent pas de réponse de leurs dirigeants. La discorde des partis francophones face au tronc commun flamand est très inquiétante.

Que propose le RWF ?

Il faut avant tout garder une solidarité active avec Bruxelles et obtenir, par référendum, un lien territorial entre Bruxelles et la Wallonie.

Quant à la stratégie de sortie de l'Etat belge, il n'y a guère que deux hypothèses à envisager :

  • soit une Belgique continuée, amputée de la Flandre (le « Wallo-Brux »), ensemble qui ne constituera jamais une nation et rencontrera très vite des problèmes insurmontables, notamment dans le domaine de la sécurité sociale, dont les prestations chuteraient d'au moins 20 % ;
  • soit l'intégration à la République française, ces deux mots revêtant une égale importance.

Paul Furlan concède à PHG qu'il n'a pas tort sur tous les points, mais il reste convaincu qu'une solution pourra être trouvée, parce qu'il existe encore, selon lui, des hommes d'Etat capables de prendre les bonnes décisions pour améliorer le fonctionnement de la Belgique.

Il passe en revue les trois scénarios envisageables :

  • la poursuite du fédéralisme à la belge (« pris comme modèle dans le monde entier », précise-t-il), réformé, plus mûr qu'aujourd'hui ;
  • l'autonomie de l'entité Wallonie-Bruxelles : pourquoi pas, se demande-t-il, puisqu'il existe en Europe des Etats plus petits encore, qui connaissent une prospérité enviable ;
  • le rattachement à la France, dont l'inconvénient majeur est le jacobinisme. Et puis, s'interroge-t-il, qu'adviendrait-il de Bruxelles ? Et de la famille royale ?

Denis Ducarme, répondant à une question du modérateur, estime que l'ensemble Wallonie-Bruxelles ne pèserait d'aucun poids sur le plan économique.

Il constate que, sur le plan institutionnel, il n'y a plus de famille libérale en Belgique. Les propos tenus par M. De Gucht le week-end dernier (« la frontière linguistique est une frontière d'Etat ») en sont une confirmation éclatante.

Reprenant le titre de sa Carte blanche parue dans Le Soir, il déclare qu’ « il faut écrire la musique de la partition ». S'il ne faut pas forcément la jouer, il faut en tout cas se préparer. Ce n'est malheureusement pas ce que font les politiques. Aujourd'hui, envisager la fin de la Belgique est impopulaire. Il faut avoir ce courage, dit-il.

Les problèmes communautaires ont-ils des répercussions économiques ? demande en substance le modérateur à Paul-Henry Gendebien.

Ce qui va tuer la Belgique, répond ce dernier, c'est la conjonction, en Flandre, entre la volonté populaire et le monde politique, qui, dans sa grande majorité, veut le dépeçage de la Belgique. Mais c'est aussi la convergence entre le monde politique flamand et le patronat flamand, qui veut avoir les coudées franches pour mener une politique libérée des contraintes de l'Etat belge.

La fin de la Belgique n'est pas la pire chose qui puisse arriver à la Wallonie, estime-t-il. Bien au contraire. Il cite l'exemple de l'enveloppe de 150 millions d'euros destinée à l'industrie aéronautique, qui est bloquée depuis 11 mois en raison des exigences flamandes d’une clé de répartition plus favorable (60/40) mais qui ne correspond pas à la réalité.

Devenue française, la Wallonie serait-elle réduite à la portion congrue ? A cette question, Paul-Henry Gendebien répond que la France est un Etat largement décentralisé et un Etat solidaire (il suffit de comparer Mons et Valenciennes, Charleroi et Lille). Comme région de France, la Wallonie se classerait 6ème sur 23 (PIB). Il est persuadé que l'identité wallonne peut parfaitement être préservée dans le cadre d'une région française.

Dans la salle, Willy Burgeon, l’ancien président du Parlement wallon, affirme qu'il y a à présent des partisans d’une réunion à la France dans tous les partis, et notamment au PS. Il leur appartient de propager cette idée et de s'organiser dans leur parti.

Pour conclure, Denis Ducarme considère que, puisque les francophones de ce pays sont bafoués, il faut préparer l'avenir sans tabous, y compris envisager un rapprochement avec la France.

Jean-Paul Roos, membre de la section de Bruxelles.


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