Echos de Flandre - juin 2006

Le Premier flamand, Yves Leterme, a vertement critiqué le mode de gestion de la Région de Bruxelles-Capitale. En li­gne de mire, son inefficacité due à la prolifération des ni­veaux de décision (De Tijd et Het Laatste Nieuws, 19.04.06). Dans l'édition du Tijd du lendemain, Stefaan Huysentruyt écrit que «Bruxelles n'est pas une région mais une ville. Avec un statut de région, les « ketjes » vivent au-dessus de leurs moyens.» Dans la foulée, la réaction maladroite de Laurette Onkelinx traitant Leterme de «dangereux séparatiste» a eu le don de braquer les milieux flamands dans la mesure où le Premier flamand est d'habitude considéré comme un pragmatique et un modéré. Encore une sortie ratée de la nouvelle coqueluche de Lasne !

Les Métallos de la FGTB se sont officiellement scindés. Le Standaard (21.04.06) titre : «Aujourd'hui se terminent 120 ans d'unité nationale au sein du syndicat des métallos.» Tony Casterman, secrétaire des Métallos du Limbourg, résume la situation : «Regarder derrière soi n'a aucun sens. Pourquoi rester ensemble quand la vie en commune ne tient plus la route ?». Et le quotidien gratuit Metro de commenter : «Cette centrale syndicale est ainsi la première à quitter sa structure unitaire». Selon la presse flamande, les métallos wallons cherchaient depuis longtemps un point de rupture parce que leurs camarades flamands commençaient à prendre le des­sus au sein de la centrale. C'est aussi simple que cela! Il pa­raît que l’on se dispute déjà pour savoir si les métallos bruxellois dépendront de la Wallonie ou de la Flandre. Une préfiguration de ce qui nous attend en 2007 ? Hormis la Cour et l’armée, que reste-t-il encore des structures unitaires ? ponctue un Standaard lucide.

La tuerie d'Anvers n’a pas entamé le capital de voix du Be­lang. C'est ce que confirme le désormais célèbre Stemmen­kampioen (Het Laatste Nieuws, 02.05.06) : le Belang serait à 27,6 % (au secours !) et le cartel CD& VAWA resterait la plus grande formation avec 31.4 %. Le drame du nationallisime fla­mand ? L"impossiblilté de principe de former une coalition disposant d'une majortié confortable pour liquider la Question belge. Dans cette optique, la NVA a donné quelques fris­sons à son partenaire, le CD& V par la voix de Mark Dernes­maeker. L'ancien journaliste vedette de VTM a déclaré au périodique satirique ‘t Palliterke (12.06.06) quil n'était pas hostile, au cas par cas, à conclure des alliances communales avec le Belang après les élections d'octobre. Son argument principal : «Dans certaines communes de la périphérie, 40% des jeunes familles sont francophones et mon choix est vite fait : entre le fanatique FDF francophone et le Vlaams Belang, je ne dois pas réfléchir deux minutes, même plutôt moins». Sur les antennes de la VRT, Bart De Wever a réagi embar­rassé mais sans vraiment désavouer son comparse. Il est vrai que le Bart flamand entend négocier avec les Francophones un «contrat de rupture» en 2007 même s'il croit qu'il n'existe pas à l'heure actuelle une majorité en Flandre pour réaliser cet objectif. Mais, selon lui, les affaires du PS concourent de façon inespérée à ouvrir les yeux des Flamands. Le Morgen (24.04.06) revient sur les paroles d'Eric van Rompuy : «L'on sait depuis longtemps que le CD&V va aux élections avec des attentes claires en madère de réforme de l'État. Plus loin, il ajoute que, pour pouvoir répondre aux défis d'un monde glo­balisé, la Flandre doit maîtriser ses leviers socio-économi­ques et si les Francophones ont un problème avec cette vi­sion des choses, alors la Belgique n'a qu'à bien se tenir. «Le CD&V ne se sent plus responsable de la survie de la Belgi­que», termine-t-il menaçant. -

Les discours du 1er mai du PS appelant à la constitution d'une nation francophone ont fait sursauter la presse fla­mande. Dans le Nieuwsblad, Leterme a déclaré que le PS devait apprendre à vivre avec le fait qu'il ne représente que 14 % des votes exprimés en Belgique. La presse flamande a d'ailleurs beaucoup ri de la manchette de La Libre (29.04.06) «Di Rupo : les Flamands n'auront pas Bruxelles» où l'on voyait le Premier wallon dans un char prendre une posture digne d'un Gaston Lagaffe du lun­di matin.

La partition de notre beau royaume inscrite à l'ordre des tra­vaux de la Chambre ! Le 1er juin dernier, les députés fla­mands unanimes ont accepté de débattre d'une proposition de résolution du Vlaams Belang (en réalité, une litanie de rancœurs remontant le plus souvent au XIXe s. et à 14-18) datée, comme par hasard, du 18 mai 2006, jour anniversaire des sanglantes Matines brugeoises de 1302. Le document appelle à la préparation du «démembrement de l'État belge en vue d'accorder l'indépendance au peuple flamand et au peuple wallon souverain » (Doc 5124941001 disponible sur le site internet de la Chambre des représentants). La presse flamande a peu répercuté ce qui constitue malgré tout un fait historique. Hormis un entrefilet dans le quotidien Het Belang van Limburg et un article sur le Télétexte, celle-ci n'a pas vraiment prêté attention à la décision de la Chambre des re­présentants de prendre en considération la proposition du Belang. Paradoxalement, le CD&V n'était pas disposé à faire un commentaire à ce sujet, mais quand celui-ci a vu le SP.A et le VLD embrayer, il n'a pas voulu endosser le maillot du mauvais Flamand. Le seul qui s'est abstenu ? Le Président de l’Assemblée, Herman De Croo, qui a droit aux meilleures cuvées de Laeken ! Selon le pontife de Brakel, c'est le S.PA qui a paru le plus ambigu. La presse des Pays-Bas, souvent plus lucide que d'autres voisins sur l'état de délitement de la Belgique, a répercuté l'affaire. De Volkskrant et Het Finan­cieel Dagblad en ont fait leurs choux gras, tandis que le quo­tidien Algemeen Dagblad a repris le sujet dans un article consacré à l'indépendance du Monténégro : «Les rêves d'indépendance viennent parfois d'ailleurs» .

Le Standaard (22.05,06) a titré en manchette : «Une nouvelle vague de scandales touche le PS». En substance, l'estompement de la norme, le détournement de fonds pu­blics et la corruption régneraient partout en Wallonie. Le Be­lang van Limburg (24.05.06) va même plus loin : Di Rupo et son PS vérolé n'est plus en mesure de donner des leçons de démocratie à la Flandre. Paul Geudens, dans la Gazet van Antwerpen (23.05.06), estime que «dans le sud du pays, il semble qu'on ait affaire à un système très répandu en rap­port avec un seul parti». Michal Lescroart, dans le très po­pulaire P-magazine (06.06.06) agite la guillotine : «Ce PS pourri justifie la fermeture du robinet qui coule en direction de la Wallonie».

Les patrons flamands montrent des signes d'impatience, comme ce Luc Van Nevel, président du C.A. de la société Picanol : «Les Flamands travaillent les deux premiers mois de l'année pour payer les transferts aux Wallons. Aucune éco­nomie ne peut supporter cet état de choses...»

Et encore un poids lourd du patronat flamand qui rejoint le Belang : Bruno Valkeniers, président de l'Algemeen Neder­lands Zangverbond (AN2) et ancien cacique du port d'Anvers, a franchi le Rubicon. Dans une interview accordée à la Gazet van Antwerpen (15.06.06), il motive son choix : «La Flandre sera confrontée à d'importants défis dans les pro­chaines années. Je suis convaincu que le Vlaams Belang est incontournable pour donner enfin à la Flandre ce à quoi elle a droit. Je veux aider à rompre le cordon sanitaire et, avec l'ensemble des nationalistes flamands, j'aimerais apporter ma pierre à l'indépendance de la Flandre». Valkeniers em­mènera la liste du Belang à la province d'Anvers.

Ludwig Verduyn (Menzo, juin 2006) est d'avis que depuis peu le CD&Va choisi une autre stratégie : il serait prêt à donner le poste de Premier ministre à un Di Rupo affaibli mais toujours aussi ambitieux en échange d'un round communautaire fruc­tueux pour la Flandre. Mais tous ne partagent pas cette stra­tégie. Ainsi, lors de l'émission Canvas (02.05.06), Luc Van der Kelen, l'éditorialiste du Laatste Nieuws, a balancé à un Chris­tian Laporte, transmuté en couvreur du Palais : «Votre Roi est francophone, c'est normal que le Premier ministre soit tou­jours un Flamand ! »

Paul-Henry Gendebien a accordé une interview remarquée au Knack (14.06.06) sous le titre «Le PS n'est pas le docteur mais la maladie» (ndlr : de la Wallonie). Le mouvement fla­mand (VVB) et de nombreux blogues s'en sont fait l'écho.

Ainsi que le Courrier international (15.06.06). On le voit, la Question belge commence à hanter les cénacles européens.


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