Echos de Flandre - avril 2005

En tout bien tout honneur, commençons par la saga de l'arrondissement Bruxelles­Hal-Vilvorde (BHV) qui ali­mente de nouveau la presse flamande. Plusieurs mois de consultations de constitutionnalistes des deux bords et de parlotes dans "un confessionnal" n'ont même pas accouché d'une souris!

Dire que le monde flamand s'impatiente tient de l'eu­phémisme. Aussi, les partis nordistes ont-ils estimé qu'à défaut d'une proposition du gouvernement fé­déral pour la fin des vacances de Pâques, la ques­tion devait être déférée au Parlement

"Une crise liée à BHV est devenue inévitable" titre le De Standaard (12.04.05). Le quotidien indique, en effet, que la question divise de plus en plus les deux partenaires flamands du gouvernement fédéral. La veille, Johan Vande Lanotte aurait fait un rapport peu optimiste de la situation au bureau du SP.A

Chargé avec Didier Reynders de "déminer" cet épi­neux problème, il admet, relate De Standaard, "que la procédure a fait long feu et qu'aucun progrès n’a  été enregistré depuis longtemps"

 Or, rappelle le quotidien, si aucune solution ne de­vait être trouvée par ces deux "Excellences", la question devrait immanquablement aboutir sur la ta­ble de la commission de l'intérieur de la Chambre afin qu'elle entame l'examen des projets de loi, déposés quelques mois plus tôt par les partis flamands.

C'est la solution que, d'ailleurs, réclame la majorité de ces partis en ce compris les présidents du SP.A, Steve Stevaert, et de Spirit, Geert Lambert. Autre son de cloche au VLD où l'on estime que cette question ne vaut pas une crise gouvernementale. Le SP.A semble d'ailleurs craindre que le VLD ne vote finalement contre le projet de loi flamand, ce qui entraînerait, par voie de conséquence, une crise au sein du gouvernement de la Flandre. "Le SP.A, commente De Standaard, se sent comme une maïzena (sic) entre deux gouvernements (aux visées) contraires" '

Situation qui ne peut durer. De là à conclure que le VLD est en bisbille avec le SP.A et que les jours du gouvernement Verhofstadt II sont comptés...

Dans la même édition, Steven Samyn se livre à une spéculation sur de possibles scénarios: ou bien les discussions seront longues au sein de la commis­sion, ou bien, si tous les partis flamands sont solidai­res, elles devront aboutir quitte à ce que les franco­phones tirent ensuite "la sonnette d'alarme".

Cela renverra automatiquement le problème sur la ta­ble du gouvernement fédéral avec le risque avéré de le voir tomber. Toutefois, il reste une inconnue: le VLD fera-t-il bloc? S'il fait défection, dit Samyn, une crise est inévitable au sein de la majorité VLD­SP.AlSpirit-CD&V-NVA du gouvernement flamand. Or, on ne peut imaginer des élections régionales fla­mandes anticipées ni recourir à un gouvernement expédiant les affaires courantes pendant 4 ans. Dès lors, conclut-il, "ou bien une solution miracle sort du chapeau, ou bien la scission est approuvée à la Chambre (par la majorité flamande). Dans ce dernier cas, le gouvernement fédéral est poussé à la crise". Solution immédiate ou plus lointaine par l'entremise des urnes, Samyn estime que, quoi qu'il arrive, une solution interviendra in fine. CQFD.

De son côté, De Tijd divulgue, le 13 avril, les propos d'Herman De Croo qui déclare que le gouvernement Verhofstadt examine déjà les scénarios qui permet­traient d'éviter une crise si aucun accord politique ne se dégageait à propos de BHV.

Cependant, Herman De Croo plaide pour que les discus­sions suivent d'abord leur cours en commission de l'intérieur, car il considère qu'une solution est tou­jours possible, soit qu'elle émane des parlementaires eux-mêmes, soit qu'elle vienne du gouvernement.

La veille, le même journal pensait que le mauvais cli­mat existant entre les partenaires francophones du gouvernement fédéral (le MR et le PS) était tel qu'il était illusoire de croire à une avancée du dossier BHV.

Chute du gouvernement, nouvelles tergiversations ou accord laborieux, nul ne peut savoir lequel de ces cas de figure l'emporterait au moment de la clôture de ce numéro de notre revue.

Si BHV est de loin la plus grosse pierre d'achoppe­ment entre les deux communautés, il y a d'autres su­jets qui fâchent.

Ainsi, le Conseil de l'Europe est de retour sur nos terres. En cause, une double plainte introduite de­vant lui : d'une part, celle émanant de responsables politiques flamands de Bruxelles et qui dénonce le fait que, souvent, les patients néerlandophones ne se­raient pas bien accueillis dans leur langue dans les hôpitaux bruxellois; d'autre part, celle du FDF protes­tant contre l'emploi exclusif du néerlandais lors du dépistage du cancer dans les communes à facilités de la périphérie. L'envoyée du Conseil de l'Europe, la Roumaine Mme Cliveti enquête donc (1). Fabian Lefevere (De Morgen 14.04.05) ironise, rappelant que les précédentes visites du Conseil de l'Europe (celles de M. Columberg et de Mme Nabholz) avaient donné lieu à "un vaudeville communautaire".

Encore faut-il voir ce qu'entend le rédacteur par ces mots. En effet, il ne semble pas que cette expres­sion concerne particulièrement l'un des politiciens flamands ayant introduit la pétition auprès du Conseil de l'Europe, le VLD Sven Gatz, de qui il relaye ce qui suit: "La plupart du temps, les rapports du Conseil sont équilibrés. Nous avons l'impression que Cliveti connaissait le dossier et a posé les bonnes ques­tions. Mais, avec Columberg et Nabholtz-Haidegger , nous n'avons pas eu de chance à ce niveau-là".

Rappelons que le rapport de la Suissesse, Mme Nabholtz-Haidegger avait abouti à la recommandation du Conseil de l'Europe de voir la Belgique ratifier la convention-cadre sur la protection des minorités na­tionales, ce qui aurait entraîné des conséquences non négligeables pour toutes les Communes à facili­tés du pays, notamment pour celles de la périphérie bruxelloise.

Bien entendu, la réaction du Parlement flamand ne s'est pas fait attendre: c'était neen! De là à penser que le duo Columberg-Nabholtz avait posé les mau­vaises questions et forcé au "vaudeville communau­taire", il n'y a qu'un pas que certains en Flandre n'hé­sitent pas à franchir!

Enfin, comment ne pas parler de la récente polémi­que autour d'un traitement du chômage jugé trop laxiste en Wallonie. Le très sérieux périodique Trends n'a pas hésité à se saisir du sujet et entame son analyse par l'étude du sénateur MR Alain Des­texhe. Pour rappel, celui-ci a récemment provoqué une levée de boucliers de l'establishment wallon en affirmant, chiffres à l'appui, que l'économie wallonne restait à la traîne.

En effet, précise M. Huwart (Trends), le gouverne­ment wallon n'a pas su encore résorber le chômage de longue durée et cela "a de graves conséquences ... pour la Flandre. Entre 2000 et 2002, la part de la Wallonie dans le total belge des revenus des per­sonnes physiques a encore diminué. Depuis lors, la contribution fédérale en faveur du budget de la Ré­gion wallonne a augmenté en 3 ans de 15%, de 659 millions d'euros en 2002 à 758 millions d'euros en 2004"

Dans ce contexte, le périodique n'hésite pas à s'étonner du manque de rigueur de l'ONEM vis-à-vis de chômeurs n'ayant pas répondu à l'accompagne­ment offert, alors que du côté flamand, où le chô­mage n'a pas la même ampleur, le contrôle est plus sévère.

Le mot de la fin de cette rubrique va à un citoyen fla­mand qui s'exprime dans les colonnes du quotidien populaire Het Laatste Nieuws (12.04.05): "Déjà 175 ans que nous, Flamands, payons pour cet appen­dice sudiste et nous n'avons jamais rien reçu en re­tour. Même pas un merci. Cela fait combien de dé­cennies que les Wallons disent qu'ils vont s'attaquer aux problèmes de leur région? Il est grand temps de mettre fin à cette erreur de l'Histoire et que la Flandre devienne enfin complètement autonome"

Même si cette réflexion ne brille pas par sa modéra­tion, elle est toutefois symptomatique de ce que les simples citoyens flamands pensent. Précisons ce­pendant que ce bon Flamand habite, douce ironie, à Rebecq, dans le Brabant wallon. Cela laisse rêveur .

(1) Le 16 avril, Mme Cliveti a tranché: la plainte flamande n'est pas fondée. Elle souhaite même voir le régime du bi­linguisme appliqué à la périphérie bruxelloise.

Revue de presse de Marc Philippe publiée dans la revue Wallonie-France.


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