Echos de Flandre - juin 2002

Aucun média francophone ne vous dira que, le 21 avril dernier, 6.000 personnes (six mille !), parmi lesquelles Filip Dewinter du Blok et Geert Bourgeois de la NV-A, ont applaudi à tout rompre le discours de Hugo Portier, président de l’Algemeen Nederlands Zangverbond (Fédération des associations musicales flamandes), qui concluait en disant que la Flandre et la Wallonie devaient former deux Etats indépendants (De Standaard, 22/04/02).

Péripétie ? Le CD&V rejeté dans l’opposition et poussé dans le dos par les mêmes NV-A et Vlaams Blok – "Messieurs les non-chroniqueurs d’une mort belge annoncée", cela fait déjà pas mal d’électeurs – se radicalise de mois en mois sur le terrain communautaire. Au pouvoir depuis la fin de la guerre, les catholiques flamands constituaient un pilier essentiel de la monarchie, et donc du régime belge. L’allocution du Prince Laurent critiquant ouvertement la politique de Dehaene et les mesures « arc-en-ciel », jugées très laïques au plan éthique, ont précipité l’irréversible tournant confédéraliste du CD&V. Pour mémoire, rappelons que son président Stefaan De Clercq a posé comme préalable à toute future participation gouvernementale, la suppression de la loi sur l’euthanasie. Il est vrai que, côté francophone, on invoque le droit de vote des étrangers comme ukase. Un bel imbroglio pour 2003 en perspective ! Le CD&V, plus que jamais sous l’influence de Luc Van den Brande (cf. le rapport Nabholz-Haidegger sur les minorités), pense chaque jour à l’avenir de la Flandre. Il fait pression pour élaborer un nouveau cahier des charges institutionnel. Si on se réfère aux 5 résolutions du Parlement flamand votées en 1999, il y a encore du pain sur la planche : scission de la Sécurité sociale, des soins de santé, de la politique scientifique, de la Justice, des fédérations sportives, de la SNCB…

Prudents, les partis flamands de la majorité ont annoncé qu’ils s’opposeront à ce travail de sape du CD&V. Mais, dans La Libre (06/06/02), Francis Vermeiren, l’omnipotent bourgmestre VLD de Zaventem, a répondu avec la roublardise d’un homme de la terre : Nous ne voterons pas la résolution du CD&V (…) notre programme prévoit aussi de nouvelles étapes dans la réforme de l’Etat, mais de façon plus intelligente qu’auparavant (…) En ce qui nous concerne, la Sécurité sociale est un thème important, même si nous souhaitons maintenir une solidarité à l’échelle fédérale. La prochaine formation gouvernementale sera cruciale à cet égard. La clarification des structures de l’Etat sera un élément majeur de ces futures négociations. (ndlr : c’est nous qui soulignons).

D’autres signes devraient avertir les partis francophones – dont on ne sait si l’absence de stratégie communautaire relève de la naïveté ou de la collaboration honteuse – de la virulence de la prochaine offensive flamande. Le VLD vient d’intégrer 4 mandataires de la défunte Volksunie. Ce renfort accentuera le caractère nationaliste du parti du Premier ministre. Pour preuve, dans La Libre (24/05/02), Vincent Van Quiquenborne faisait part d’une réflexion cruciale pour l’avenir de la Sécurité sociale, le dernier fleuron belge du PS : La volonté de régionaliser les soins de santé semble acquise par tous (ndlr : tous les Flamands), mais on se chamaille au sujet de l’opportunité d’une privatisation.

Sur la même longueur d’onde flamande, le SP.A s’est trouvé, en la personne de Steve Stevaert qui réclame la régionalisation de la SNCB, un fer de lance très autonomiste. Ce populiste tranquille, qui fait partie du lobby limbourgeois avec Sauwens et Gabriëls, estime que sa province constitue un désert ferroviaire et veut faire sauter la clé de répartition des investissements 60/40, pourtant déjà défavorable à la Wallonie si l’on tient compte de sa superficie. Pour arriver à leurs fins, les socialistes flamands recevront sous peu l’appui de l’homme le plus populaire (et le plus flamand ?) de Flandre, Bert Anciaux, et indirectement celui de Karel Vinck, ancien patron des patrons flamands, que Verhofstadt, au mépris des procédures légales, a proposé sans rire à la tête de la SNCB-NMBS (NM-PS comme on dit au Nord). Patients, nos beste vrienden continuent donc à tisser leur toile.

Pendant ce temps, Claude Eerdekens confiait lors de l’émission flamande Villa politica (VRT, 14/06/02) qu’il était partisan d’une action maximale avec la France en cas d’indépendance de la Flandre. Trois ans auparavant, interrogé sur l’opportunité de la création du Rassemblement Wallonie-France, il avait déclaré au fumeux Journal du Mardi qu’il voyait « la question belge » se résoudre par une intégration dans l’Union européenne ! De grâce, M. Eerdekens, en ces temps d’abandon, c’est aux Wallons, et non aux Flamands, qu’il faut adresser vos professions de foi réunionistes !


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