Echos de Flandre - août 2002

Patrick Dewael, ministre président de la Région flamande, a publié fin juin son Vlaams Manifest. Ses revendications sont claires : régionalisation de la politique de mobilité (SNCB, Zaventem, …), défédéralisation de la politique socio-économique (sont ici visés la formation et les salaires liés à la productivité), scission des soins de santé et des allocations familiales, mais, bien entendu, on laisse les pensions à charge du fédéral vu le vieillissement galopant de la Flandre.

Niet a riposté Van Cau-le-Wallon, qui, piteusement, a cru bon de rappeler ses origines flamandes.

Luk Van der Kelen, éditorialiste du grand quotidien populaire Het Laatste Nieuws, lui a répondu de façon cinglante : « Dewael n’a fait que reprendre les 5 résolutions du Parlement flamand votées voici 4 ans […] Ce dirigeant – qui n’a jamais été un radical et qui durant son mandat a fait preuve d’une grande compréhension pour nos compatriotes wallons – est décrit au Sud comme un loup dans la bergerie, bien pire que Van den Brande. C’est aberrant ». Commentant la fin de non-recevoir de Van Cau et son allusion à l’accueil des travailleurs flamands dans une Wallonie jadis prospère, Van der Kelen rétorque, non sans mauvaise foi : « Les Flamands devaient travailler d’arrache-pied. Les Flamands, jeunes et moins jeunes, ont dû faire le sale boulot dans les mines et dans la sidérurgie. Ils ont donc ‘profité’ de leur propre sueur (et non de la Wallonie). Ils s’appelaient Van Cauwenberghe, Onkelinx, Vanderbiest, Cools, etc. Van Cau devrait avoir honte d’utiliser à des fins politiques ses propres ancêtres, ces réfugiés économiques et ces immigrés de l’époque ».

Dewael appelle donc des Wallons comme Van Cau à samenwerken ; on ne sait s’il faut traduire par travailler ensemble ou collaborer !

Di Rupo, qui lui au moins ne peut pas se targuer d’origines flamandes, a réagi lucidement aux propos de Dewael dans un communiqué on ne peut plus officiel (et un brin solennel !) : « Bien qu’il s’en défende, l’ensemble des mesures proposées dans le ‘Manifeste flamand’ signifie sans l’ombre d’un doute la fin pure et simple de la Belgique ».

Toujours le 11 juillet, Het Laatste Nieuws (une demi page dans le Nieuwsblad du même jour) a largement rapporté l’analyse politique de Geert Bourgeois, président du NV-A, sous le titre « Ensemble, la Flandre et les Pays-Bas constituent une puissance mondiale ».

Incroyable mais vrai, Dewael est donc parfois perçu au Nord comme un traître à la Flandre. Ainsi, Gazet van Antwerpen (16/06/02) se fait acerbe : « Le gouvernement flamand fait tout son possible pour ridiculiser l’identité flamande. Les symboles liés à son Histoire ne sont sûrement pas appréciés à leur juste valeur. 700 ans après la bataille des Éperons d’or, la fierté d’être flamand est foulée aux pieds. On fait beaucoup d’efforts pour mettre en avant une vague identité belge. C’est à cette fin que servent la monarchie, les Diables rouges, la pop culture belge (sic) et quelques vedettes médiatiques. En vérité, le problème est qu’une culture belge n’existe pas, tout comme il n’y a pas de langue belge ou de race belge. »

Agalev adopte souvent un profil bas dans le sérail flamingant. Et pourtant, Frans Lozie, chef de groupe au Sénat, a déclaré au P-magazine (15/05/02) : « Je vois un pays qui glisse toujours plus entre les mains de personnages maffieux. Le PS est omnipotent en Wallonie. Ce parti y contrôle tout et c’est une situation très dangereuse. Charleroi et Liège devraient être une bonne fois pour toutes assainies, mais les socialistes francophones sont si puissants qu’ils sont à tout moment capables de bloquer n’importe quel dossier ». Rappelons que Norbert Debatselier (SP-A) planche sur une Constitution flamande. Le site internet du Vlaams Blok démontre que ce parti d’extrême droite, qui décidera sans doute du sort de la Belgique, en a fait son dossier prioritaire, avec l’indépendance de la Flandre !

Dans Gazet van Antwerpen (13/06/02), Paul Geudens fustige les remous de la Justice bruxelloise : « Dans ce pays, depuis des décennies, les Flamands se sont battus pour la flamandisation de la magistrature. C’est désormais remis en cause par la majorité arc-en-ciel. Les magistrats francophones de l’arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvorde sont exemptés de néerlandais. Plus grave encore : les juges qui viennent d’être nommés recevront une prime pour unilinguisme ».

Dans le même ordre d’esprit, Frans Rombouts, ex-manager de la Poste, se plaint amèrement dans Het Laatste Nieuws (16/06/02) : « Pendant toute la réorganisation de la Poste, je n’ai pas eu de problème notable en Flandre. Les partis flamands se montraient extrêmement pragmatiques, mais les divergences de vues entre communautés croissent de jour en jour. En Wallonie, on ne veut pas entendre parler de réalité économique. Cela tourne encore et toujours autour de l’emploi et donc du clientélisme […] Dans certains bureaux de Wallonie, il faut 40 % de personnel en plus pour effectuer le même travail qu’en Flandre ».

Dans son communiqué de presse du mémorable 11 juillet, le président du CD&V, Stefaan De Clerck, avertit : « La dernière réforme de l’Etat a peu apporté à la Flandre, tout en lui coûtant beaucoup […] le CD&V a clairement choisi le modèle confédéral. Pour nous, la Flandre constitue la base de départ (uitgangspunt). La solidarité avec les francophones doit être honnête et non contrainte. Le lien flamand avec notre capitale (Bruxelles) doit être renforcé ».

Enfin, Stefaan Noreilde, président des Jeunes VLD, qui eux aussi ont opté pour le confédéralisme (c’est pourtant le parti du Premier ministre) s’est confié au site www.politics.be : « Dans de trop nombreux dossiers, il existe des visions divergentes entre le Nord et le Sud. La liste est longue. La Flandre possède toutes les compétences pour se prendre en main. Un jour, nous devrons examiner ce que nous voulons encore faire ensemble. »


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