La Wallonie étatisée s’éloigne de plus en plus de la Flandre

Les partis politiques qui prônent plus de gouvernement, plus de redistribution, plus de sécurité sociale et plus d’impôts sont présents en Wallonie depuis des décennies », affirme Wim Verhoeven, rédacteur en chef de Trends. 2 février 2023.

La Wallonie étatisée s’éloigne de plus en plus de nous

Une réforme de l’État « extralégale » en 2024 (dixit Bart De Wever) ? Forcer une réforme des pensions parce que sinon vous annoncerez « la fin de la Belgique » (dixit Sammy Mehdi) ? Alors que la température communautaire commence à remonter, il convient d’examiner les chiffres de plus près. La dure réalité est que la Flandre et la Wallonie s’éloignent de plus en plus l’une de l’autre.

Revenons d’abord sur un dossier que Trends a mis en lumière à la mi-décembre 2022. Nous avons ensuite publié un « top 50 fiscal » basé sur l’immense base de données de Trends Business Information, qui contient les chiffres clés de toutes les entreprises belges. A partir de là, nous avons épuré un classement des entreprises qui ont payé le plus d’impôt sur les sociétés en 2021. Il s’agit des chiffres les plus récents et les plus complets, basés sur les comptes annuels déposés.

Discrètement, dans un coin, il y avait une petite boîte très instructive. En 2021, 16,1 milliards d’euros d’impôt sur les sociétés sont entrés dans la SA Belgique. Sur ce montant, 10,6 milliards provenaient de la Flandre et un peu moins de 3 milliards de la Wallonie. C’est un facteur de 3,5. Intéressant aussi : La Flandre comptait 238 000 entreprises en 2021. La Wallonie en avait 85 000. C’est un facteur de 2,8. Entre 2020 et 2021, 8 000 entreprises ont été ajoutées en Flandre et 1 800 en Wallonie. C’est un facteur de 4,4. Et encore une chose à désapprendre : en 2017, la Flandre comptait 207 000 entreprises et la Wallonie un peu moins de 77 000. Ainsi, en cinq ans, 15 % des entreprises ont été ajoutées en Flandre et 10 % en Wallonie. Ces 15 % sont en fait encore trop peu, et nous ne discuterons donc pas du tout des 10 %.

Trends vous présente d’autres chiffres clés cette semaine et ils disent tous la même chose. De plus en plus loin, nous nous éloignons l’un de l’autre. Cela vaut pour le taux d’emploi, la croissance économique, les finances publiques… Il est certain que la crédibilité financière de la Belgique francophone est soumise à une pression croissante, qui s’étend également au niveau fédéral.

Bien sûr, il y a une dimension politique à cette réalité économique. L’économie wallonne flotte à 70 % grâce à l’initiative des pouvoirs publics, dit la Banque nationale. Il s’agit d’une économie presque étatique, et les électeurs francophones semblent en être satisfaits. Les partis politiques qui préconisent plus de gouvernement, plus de redistribution, plus de sécurité sociale et plus d’impôts le font depuis des décennies. La progression du PTB communiste dans les sondages indique même une certaine radicalisation. Tout cela est de plein droit pour l’électeur francophone, mais la question est de savoir comment le traiter dans la construction belge.

En période de prospérité, vous pouvez balayer les différences idéologiques sous le tapis pendant longtemps, mais au bout du compte, la réalité économique l’emporte toujours sur les souhaits politiques. Alors que l’environnement économique international devient plus incertain, l’éternelle impasse idéologique, l’éternel immobilisme et les points de vue opposés sur les réformes économiques risquent de devenir un handicap croissant. Avec la hausse des prix de l’énergie, vous avez déjà pu constater que des économies fortes et déterminées comme les Pays-Bas et l’Allemagne sont beaucoup plus à même de protéger leurs industries contre des chocs sévères. La même menace plane si nous promouvons bientôt l’écologisation de notre industrie en Europe. Pendant ce temps, la compétitivité de nos entreprises n’a fait que se détériorer. Ce que nous ne voulons pas, c’est que l’économie flamande soit entraînée davantage dans cette spirale négative. Dans ce pays, nous noyons trop souvent la réalité économique dans le théâtre politique et les arguments émotionnels. Mais cette fois, il faudra faire quelque chose.