Echos de Flandre – avril 2004

Comme annoncé dans le précédent Wallonie-France, Mia De Vits quitte la présidence de la FGTB pour conduire la liste européenne du SP.a. En 1995, Robert Voorhamme avait aussi franchi le Rubicon. Devenu échevin d’Anvers et député flamand, il confie à la revue Doorbraak d’avril 2004 : « De Vits constituait une des dernières chances pour arriver à un nouvel équilibre communautaire au sein du syndicat. Si les Wallons n’abandonnent pas d’urgence leur réflexe unitaire, la scission est inévitable. (...) En martelant le thème de la solidarité, les Wallons vont obtenir l’effet inverse. La solidarité ne peut subsister que si chacun y trouve son compte. »

Les médias du nord ne jouent pas aux laquais de Laeken, comme la RTBF. La télévision flamande a proposé en primeur à 409.500 téléspectateurs (!) un documentaire anglais sur le pillage du Congo par Léopold II. La presse flamande n’a pas été en reste. Ainsi Paul Geudens (Gazet van Antwerpen, 5.4.2004) cite Emile Vandervelde, l’ancien tribun du Parti Ouvrier Belge, qui surnommait le Cinquantenaire « l’Arc des mains coupées ». Il remarque par ailleurs que l’auteur du documentaire n’a pas pu compter sur la participation des historiens francophones, ceux-ci estimant que leurs déclarations pourraient nuire à leur plan de carrière. Ah, toujours ce manque de courage intellectuel au sud du Royaume ! Dans la foulée, le quotidien anversois compare les « Win for life » des monarchies hollandaises et belges : «  Aux Pays-Bas, la reine Beatrix perçoit une dotation annuelle de 3,877 millions d’euros, Willem-Alexander 929.000 euros, Maxima (leur Mathilde !) 820.000 euros et le Prince Bernard 637.000 euros. La Reine mère Juliana (leur Fabiola !) recevait 1 million d’euros. En Belgique, le Roi Albert II perçoit 7,5 millions d’euros, Fabiola 1,3 million, Philippe 854.000 euros, Astrid 296.000 euros et Laurent 284.000 euros. Au total (ndlr : sans la Reine Juliana !), les Pays-Bas octroient  6,263 millions d’euros pour 16,3 millions d’habitants tandis que la Belgique verse 10,234 millions d’euros. » Et le Flamand de compter ses sous : « C’est 1,02 euro par Belge et par an contre 0,44 euros par Néerlandais. » Conclusion : les Saxe-Cobourg coûtent deux fois plus cher que les Orange-Nassau...

Rik Van Cauwelaert (Knack, 7.4.2004) souligne les incohérences de Patrick Dewael qui, comme Ministre Président de la Flandre, s’était prononcé pour la suppression pure et simple des facilités. Il avait d’ailleurs fait inscrire le point dans l’accord gouvernemental. Aujourd’hui, le même Dewael menace de sanction les bourgmestres flamands qui boycotteront les élections européennes pour forcer la scission de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Paul Van Grembergen, ministre régional flamand et coreligionnaire de Leo Peeters, le père de la circulaire, a déjà annoncé qu’il resterait de marbre.

Le 16 avril (site cdenv.be), le « Vlaams Kartel » CD&V et N-VA a dévoilé son manifeste électoral intitulé « Les Flamands méritent plus de respect ». Rien de bien neuf : la Belgique, devenue confédérale, y est vidée de sa substance et la région de Bruxelles-Capitale réduite à un rôle de figurant. En page 3, on peut lire : « Nous renforçons la présence flamande dans la périphérie en supprimant les facilités et par une politique du logement qui permette aux Flamands d’acheter des terrains et des maisons à des prix abordables ». Voilà des mots qui flirtent avec le concept de « préférence nationale » cher à l’extrême droite !

Louis Michel a montré quelques signes de fébrilité en déclarant qu’il mettrait tout son poids dans la balance pour empêcher que le CD&V revienne au pouvoir car ce serait mauvais pour le pays (Standaard, 10.4.2004). Il parle d’une « arrogance presque physique » (sic) de Pieter De Crem qui se voit déjà Ministre de la Défense nationale. On se souvient que le Maître de Jodoigne-Geldenaken a également annoncé qu’il se retirerait en France (dans le Cotentin, chez son ami Ducarme ?) en cas de participation du Blok à un quelconque niveau de pouvoir.

L’ancien Premier Ministre Mark Eyskens, un des derniers unitaristes du CD&V, avance deux objections à l’indépendance de la Flandre (Standaard, 4.3.2004) : la disparition de la Belgique entraînerait probablement pour la Flandre la perte de Bruxelles, siège de l’Otan et d’institutions européennes, ainsi que l’arrivée de la France à la frontière la plus au sud du nouvel Etat, ce qui représenterait un risque non négligeable de francisation de la Flandre méridionale ». On en déduit que ce fin politique prévoit la réunion de la Wallonie à la France en cas d’éclatement du pays ! Sur le même thème, des intellectuels flamands ont tendance à réfuter le réunionnisme pour mieux prôner une Wallonie indépendante, terre d’investissements pour la Flandre. Sans les inconvénients de la solidarité fédérale...

Si la Lettre au Roi de Jules Destrée (« Sire, il n’y a pas de Belges ») fait partie de l’Histoire, Paul Belien (revue Secessie, « Het rattachisme als dreigement », avril 2001 sur le site secessie.nu)  a retrouvé une lettre de 1917 de Charles Magnette, Grand Maître du Grand Orient de Belgique et parlementaire libéral liégeois, qui collent encore à l’actualité : « Il est intolérable que 4,5 millions de Flamands vont décider du sort de 3 millions de Wallons. Plutôt que de vivre sous le joug des Flamands, plutôt qu’une culture et une langue qui ne sont pas les nôtres, les Wallons rejoindront un espace où les poussent des affinités de race, de langue et de mœurs : à la France » (restitué en français d’après la traduction de Paul Belien, Archives Royales de Bruxelles, Fonds Havre n° 242).


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