Gouverner c’est prévoir !

Au moment où Paul Magnette, le nouveau président fantoche du PS, ne cesse de faire des courbettes devant la Flandre, l’heure n’est pas aux flatteries, aux regrets, encore moins aux invectives réciproques. Les partis francophones, toute rivalité mise au rancart, se doivent d’élaborer une stratégie vraiment commune et publique, quelque peu inspirée de « l’unionisme » des Libéraux et des Catholiques de 1829 face au pouvoir hollandais. Leur ardente obligation est de faire bloc, le temps qu’il faudra pour s’accorder sur le diagnostic – le fédéralisme a échoué – et pour se préparer à l’après- Belgique. À cet égard, ils auront à se prononcer sans tarder sur l’une des options majeures qui se présentent à eux : soit le Wallo-Brux, une petite Belgique sans la Flandre, réduite à la Wallonie et à Bruxelles, soit l’intégration de nos deux régions dans la République française. On sait que notre choix s’est porté depuis longtemps sur la solution française. Ce qui importe justement, c’est de choisir. S’ils veulent mériter le titre de responsables, nos dirigeants ne peuvent pas être pris de court ni tergiverser. Ils n’ont que trop péché jusqu’à présent par un défaut d’anticipation, lequel conduit à la perte du contrôle des événements. Il faudra définir les procédures d’une négociation de divorce à l’amiable, les objectifs de celle-ci, l’internationalisation de la question des frontières, les modalités de la transition. Dans le même temps, car les deux négociations pourraient être liées, il sera bon d’entamer rapidement les pourparlers avec la France.
Anticiper, c’est mettre tout en œuvre pour éviter le désordre politique, mais aussi – craignons-le – le désordre tout court à Bruxelles et autour de Bruxelles. Contrôler les événements, c’est assurer une séparation civilisée, dans l’ordre et le calme. Si par malheur les partis francophones s’obstinaient à vouloir collaborer avec le flamingantisme fossoyeur de l’État, ils n’en seraient nullement récompensés : l’État courrait de toute façon à sa perte et eux-mêmes seraient associés à la liquéfaction finale du fédéralisme belge. Le double langage des élites politiques et leurs atermoiements augmenteront l’inquiétude des citoyens, leur dignité et leur détermination les rassureront. Ce qu’il faut, c’est rendre des certitudes et donc des espérances à notre population doublement frappée par la crise économique et l’instabilité institutionnelle. Il va de soi qu’on ne méprisera pas ceux qui ressentent une nostalgie compréhensible à l’endroit de l’ancienne Belgique. En eux quelque chose de profond et de presque sacré est en train de se briser. On leur dira que le temps de la lucidité et du réalisme est venu, qu’il faut marcher droit et la tête haute sans se retourner, que l’avenir ne peut pas se contempler dans un rétroviseur. Jusqu’à présent, les Wallons et les Bruxellois ont fait preuve de loyauté vis-à-vis de l’État belge. Ne se reconnaissant plus dans le fédéralisme dès lors que les règles du jeu convenues autrefois ne sont plus respectées par le partenaire flamand, ils ont acquis le droit de se donner un cadre politique stable et sécurisant aux côtés de la France. Ils le feront en fonction des intérêts économiques, sociaux et culturels de leurs deux régions.
Agissant ainsi, c’est aux jeunes générations qu’ils songeront. Et l’Europe ne sera pas habilitée à s’y opposer. Nous ne pouvons plus lier notre sort à celui d’un État belge qui néglige les urgences sociales, qui prend eau de toutes parts et dont les restes ne seraient pour nous qu’un cadeau empoisonné. Nous fier à une prétendue éternité belge reviendrait à subir pour l’éternité le chantage flamand à la séparation. Cessons d’attendre docilement que la Flandre nous dicte elle-même le moment et les conditions de son départ. Il y a plusieurs « plans B », mais ils ne sont pas tous bons. C’est avec la France que nous retrouverons un pays à estimer et à aimer tout en restant nous-mêmes, Wallons et Bruxellois avec nos propres traditions, dans deux régions plus fortes, ouvertes sur l’Europe, sur la Francophonie, sur le monde.

Les autres pistes, le Wallo-Brux compris qui est cher à Monsieur Maingain et autres chasseurs de mandats wallons, ne conduisent à rien sauf à l’insécurité sociale, fiscale et financière.
Ceux qui opteront pour cette voie en dépit du bon sens doivent savoir qu’ils en paieront un jour ou l’autre les conséquences.

Paul-Henry Gendebien
Président fondateur du R.W.F.